Écrivain et universitaire, figure majeure de l’occitanisme contemporain, Robert Lafont a écrit une vingtaine de pièces en occitan avant de s’éloigner une première fois du théâtre.
“ J'ai eu vingt et un ans à Paris en 1944 et j'ai été étourdi de théâtre. J'ai vu J'irai cracher sur vos tombes, avec Michel Auclair, Le Prince de Hambourg avec Gérard Philippe. J'ai vécu tous les grands moments d'Avignon et j'ai eu un très grand désir de théâtre.
C'est à cette époque que je me suis dit : il faut faire du théâtre en occitan. À partir de 1945, avec des auteurs comme Max Rouquette, Léon Cordes, Antoine Dubernard, j'ai pensé qu'il y avait une place dans le siècle pour un théâtre d'oc dégagé des poncifs félibréens.
J'avais écrit une pièce, La Cabana, à l'âge de vingt ans, qui avait été publiée, traduite, dans la revue Europe. Je fréquentais le milieu des Lettres françaises. Madeleine Ozeray voulait jouer dans La Louve. La pièce fut créée en 1960 en français au théâtre Récamier, avec Françoise Meyruels, et j'entrai en théâtre.
Mais cette entrée reposait sur une ambiguïté fondamentale : j'écrivais en oc dans une impossibilité totale puisqu'il n'y avait pas d'acteurs, pas de metteurs en scène, pas de public pour une théâtre en langue d'oc. Il n'y avait que des auteurs. J'avais décidé de mettre fin à la traduction de mes oeuvres dramatiques en français, or les nécessités étaient françaises. […] C'est au moment où j'ai commencé à écrire que le théâtre a été ainsi, pour moi, impossible."
Propos de Robert Lafont recueillis en août 2002 par Marie-Hélène Bonafé dans : Robert Lafont, un impossible théâtre ?, Auteurs en scène, Les Presses du Languedoc, 2003.